dimanche 22 janvier 2012

1898 : The Beginning of the End for Chinese Religion ?


Texte d’Annabelle D.


Vincent Goossaert, «1898 : The Beginning of the End for Chinese
Religion ?» Journal of Asian Studies, 65-2, 2006, p. 307-336.


L’auteur a obtenu son doctorat à l’École pratique des hautes études (EPHE) de Paris en 1997, est chercheur associé au Centre national de recherche scientifique (CNRS) depuis 1998 et est à la
tête du Groupe Sociétés, Religions et Laïcités (GSRL) depuis 2004. Goossaert se spécialise dans l’histoire religieuse de la Chine prémoderne et moderne.


Dans son texte «1898 : The Beginning of the End for Chinese Religion?», Vincent Goossaert s’intéresse aux évènements qui ont mené à la destruction des temples et la montée des politiques contre la superstition de 1898 à aujourd’hui dans l’empire du milieu.  L’hypothèse de l’auteur est que ce mouvement, qu’il appelle «Destroy temples to build schools» («Détruire les temples pour en faire des écoles») s’est réellement enclenché grâce au moment propice où il s’est formé, c’est-à-dire dans une période de grands changements
dans le discours politique et social sur la r eligion.


Dans ce texte, Goossaert explique d’abord le contexte religieux chinois avant 1898, où la construction philosophique de la religion différait de l’Occident par ses processus de «salut individuel» (méditation, cultes locaux des saints et des ancêtres) ainsi que la présence de trois religions institutionnalisées : le bouddhisme, le
taoïsme et le confucianisme. À la fin de la dynastie Qing, en pleine transition dans l’époque moderne, l’auteur soutient que ce n’est pas l’athéisme qui est à la source de ce mouvement de réforme mais plutôt
les nombreux projets sociaux et politiques visant à améliorer la «conditions spirituelle» de la Chine, notamment la création d’institutions religieuses qui adoptent un discours moderne sur la
culture et la civilisation.


Le décret de confiscation des temples, émis le 10 juillet 1898, est décrit comme étant un point tournant dans le contrôle de la religion par l’État chinois et s’inscrit dans le désir de plusieurs leadeurs de mettre sur pieds un système d’éducation et des institutions économiques inspirées de l’Occident dans le but de survivre au
contexte impérialiste. Le discours des élites n’est toutefois pas homogène, certaines préférant conserver intact le tissu social et d’autres voulant transformer dramatiquement la société chinoise en la faisant entrer dans la modernité. Ces divergences d’opinions sont témoignées dans les éditoriaux de journaux, notamment le Shenbao, où l’idée de transformer les temples en écoles est reçue avec enthousiasme par certains et perçue comme étant franchement insuffisante par d’autres.


Dans la période pré-1898, l’auteur souligne quatre cibles de la critique religieuse dans le journal Shenbao : les groupes sectaires, les cultes «inappropriés» et les médiums, les regroupements de cultes (pèlerinages, fêtes nocturnes, etc.) et les clergés bouddhiste et taoïste. Le discours réformateur proposé à cette époque par les élites ne vise pas le rejet de la religion comme telle, mais plutôt un retour vers la pureté de ses origines en éradiquant les pratiques qui s’y sont greffées par la suite. Peu après 1898, Goossaert soutient que plusieurs mots, alors inconnus en Chine, font leur apparition. Inspirés des notions occidentales et japonaises, les termes «religion» et «superstition» et «droit ou pouvoir divin» sont alors d’usage courant
dans les journaux. 


À partir de 1901, l’étiquette «accepté» est attachée au terme «religion» et «inacceptable» au terme «superstition», une dichotomie sur laquelle repose désormais le discours religieux. Certains cultes qui
n’étaient pas ciblés avant 1898, notamment certaines pratiques confucéennes, sont alors rejetés dans la montée du mouvement contre le superstition. Les iconoclasmes qui ont lieu à partir du XXe siècle
jumelés à la réinterprétation de la religion par l’État chinois sont, selon l’auteur, des signes évident qu’il y a une rupture importante avec le passé qui se produit durant la dernière décennie de la dynastie Qing.


Ce texte de Vincent Goossaert fait la lumière sur une période transitoire fort importante dans l’histoire religieuse chinoise. La clarté des explications et les nombreux exemples utilisés par l’auteur permettent aux lecteurs de bien saisir la complexité de ces évènements historiques qui façonnent, encore aujourd’hui, le discours religieux de l’État chinois.

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