mercredi 8 février 2012

Qigong et la tradition sectaire chinoise


Texte de Victor Klein


David A. Palmer, «Le Qigong et la Tradition Sectaire Chinoise», 2003, in Social Compass, p. 471-480


L’auteur, dans son texte, veut monter les liens qui existent entre le Qigong apparu au vingtième siècle et la tradition sectaire chinoise qui se perpétue depuis plusieurs dynasties. 


Il commence son texte par un court paragraphe historique qui finit par la suppression « officielle » du Qigong à la veille du troisième millénaire à cause de l’inquiétude du Parti Communiste Chinois face à un mouvement tant mobilisateur. Les réseaux de Falun Gong et du Qigong prennent alors une dimension secrète. 


Il souhaite d’abord préciser qu’est ce qu’était les sectes pour pouvoir ensuite les relier avec le Qigong récent. Il utilise la définition sociologique de Weber et montre qu’elle correspond à la situation chinoise car les membres sont en tension avec la société et sont tous volontairement des adeptes. Pour lui, le Qigong répond aussi à ces principes ainsi qu’à un refus de la hiérarchie sociale confucéenne. Dans les sectes et dans le Qigong, un maître peut être plus jeune que son élève, une femme maître d’un homme. Il tisse peu à peu des liens entre les sectes et le Qigong pour montre la filiation qui existe entre les deux mouvements. Par exemple, dans les deux cas l’assimilation des traditions chinoises ( bouddhiste, taoïste ) est un aspect important. 



L’argument crucial de son argumentation est celui de la culture corporelle. Telles les «sectes médiatives» en place sous certaines dynasties, c’est la culture corporelle qui est l’élément majeur du Qigong. Il lie cela à l’expérience millénariste qui promeut la transformation et la régénération du soi et de la société par un travail corporel et individuel.


Il expose aussi le fort lien qui existe avec les maîtres et leurs élèves dans les deux mouvements et le système de lignées, qui est la structure de base autant des sectes que du Qigong. Les liens de maîtres à élèves permettent la transmission des pratiques corporelles et de guérison. C’est cette transmission qui permet aussi l’allongement des lignées par l’enseignement.


L’auteur conclut en proposant deux théories. La première tissée tout au long du texte est que le Qigong est une forme moderne de la tradition sectaire chinoise. Il attribue sa naissance à une période de relâchement des politiques anti-religieuses et répressives de l’État qui a permis aux lignées / sectes de se manifester publiquement sous le nouveau nom de Qigong. Le Qigong met plus l’accent sur certains éléments adaptés à l’époque comme les aspects «hygiéniste et thérapeutique» de sa doctrine. Il avance aussi que l’État chinois a joué involontairement un très grand rôle dans la création de ces sectes. Selon lui, la destruction et l’affaiblissement des religions orthodoxes a poussé le développement de spiritualités populaires, dont les adeptes ne sont plus pris dans des institutions religieuses lourdes et peuvent pratiquer individuellement, leurs temples étant leurs corps. Grâce à cette tradition corporelle, la transmission des techniques est extrêmement facilité, ainsi que possiblement discrète, ce qui explique en parti, l’essor du Qigong dans la seconde moitié du vingtième siècle. 


Le texte propose une vision historique très intéressante d’un phénomène actuel en Chine, cela permet de mieux comprendre ses racines et ses motivations. Il est juste dommage que l’auteur n’est pas mieux précisé le but des sectes durant l’ère dynastique et républicaine. Il parle à un moment de rébellion, de techniques martiales, ce qui laisse un flou sur les objectifs religieux ou non des sectes pré-communistes. 


Annexe : David A. Palmer est un anthropologue et sociologue spécialisé sur les questions religieuses dans la Chine moderne, les mouvements spirituels et les changements qui s’opèrent dans la tradition chinoise. 

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